top of page

Pourquoi ne faut-il pas se réjouir quand Trudeau nous plonge dans le nettoyage de puits sans fond?


La fausse bonne nouvelle qui fait applaudir certains environnementalistes.

Que s’est-il passé pour que des groupes écologistes accueillent positivement le plan fédéral d’investissement massif de 1,7 milliards pour nettoyer les puits de pétrole abandonnés en Alberta ? On peut lire sur le site de Greenpeace Canada en date du 17 avril 2020 :

« Nous avons demandé au gouvernement Trudeau de venir en aide aux travailleurs et non aux pollueurs. Cette annonce est un pas dans la bonne direction. Ces mesures permettront de créer des emplois à un moment crucial, tout en nettoyant une partie du gâchis environnemental abandonné par les pétrolières. » (1)

Mais de quoi parle t-on au juste ?

«Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé que son gouvernement prévoyait de dépenser 1,7 milliard en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique pour nettoyer des « puits orphelins » — des puits de pétrole et de gaz qui ont été abandonnés par leurs propriétaires souvent en faillite sans être assainis.»

Comment se fait-il que le gouvernement fédéral intervienne de la sorte avec autant de fonds publics quand on sait que, le 2 mars dernier, le premier ministre Jason Kenney a annoncé l’octroi d’un nouveau prêt de 100 millions de dollars à l’Association des puits orphelins de l'Alberta pour décontaminer les puits de pétrole ? Le gouvernement albertain estimait alors que 500 emplois directs ou indirects seront ainsi créés. (2)

Par ailleurs, en date du 2 avril dernier, le gouvernement albertain a promulgué une loi (la Loi 12) qui vient modifier la responsabilité de l’Association des puits orphelins en lui permettant d’exploiter et de revendre des puits au lieu de les décontaminer. Cette aux droits des propriétaires terriens comme l’explique Dwight Popowich, un propriétaire terrien directement touché : «Cette loi va permettre à l’Association des puits orphelins de produire à partir de ces puits. Si ces puits produisent, nous, les propriétaires terriens devrions recevoir nos compensations annuelles. Mais cette loi lui permet de produire sans que nous soyons payés.» Une fois de plus, les entreprises pétrolières sont avantagées au détriment des citoyens. (3)

Pourtant, quand on approfondit l'annonce du gouvernement fédéral, on se rend compte qu’il y a une nuance très importante à faire entre puits orphelins, abandonnés et inactifs https://www.facebook.com/watch/?v=210219033655947

«Des documents fédéraux indiquent que le programme s’appliquera à 4700 puits orphelins en Alberta en plus de 950 autres en Saskatchewan et en Colombie-Britannique. Il devrait également couvrir 91 000 puits inactifs en Alberta et 48 000 autres sites de ce type en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.» (4)

C’est donc 138 000 puits inactifs qui sont toujours la propriété d’entreprises pétrolières actives, car elles n’ont pas déclaré faillites. Pour ce qui est des puits orphelins en Alberta, il sont sous la responsabilité de l’Association des puits orphelins de l'Alberta (5), qui est déjà financée par l'industrie et des prêts du gouvernement.

Aider ceux qui font fi des tribunaux?

Et comble du subterfuge, le gouvernement Trudeau outrepasse la loi et aide une industrie à se soustraire à ses obligations. En effet, en janvier dernier, la Cour suprême du Canada a statué que le pollueur doit payer et que les entreprises du secteur de l’énergie doivent d’abord remplir leurs obligations environnementales avant même de songer à rembourser leurs créanciers en cas d’insolvabilité ou de faillite. Cette décision rendue par le plus haut tribunal du Canada infirme deux décisions de tribunaux inférieurs selon lesquelles la loi sur la faillite avait préséance sur les responsabilités environnementales provinciales, et que les compagnies d’énergie pouvaient rembourser tous leurs créanciers sans avoir à nettoyer ou à sécuriser leurs vieux puits de pétrole ou de gaz. Selon la Cour suprême, la faillite n’est pas un permis d’ignorer ou de se défaire de ses responsabilités environnementales.

Or, cette subvention déguisée de 1,7 milliards, payée par les contribuables, signifie une aide financière directe aux industries pétrolières ayant laissé des puits orphelins derrière elles mais majoritairement des puits inactifs appartenant à des entreprises toujours existantes. Ce faisant, la prise en charge publique des dégâts causés par le privé consiste à faire disparaître le passif de l’état financier des pétrolières fautives et à transférer ce déficit directement dans la dette publique. Bref, on a encore ici un bel exemple de privatisation des gains et de socialisation des pertes. (6)

Et cette transition juste pour les emplois du secteur pétrolier, c’est pour quand ?

De plus, faut-il se réjouir de l’affectation des travailleurs de l’industrie pétrolière vers le nettoyage de ce qu’elles ont laissé derrière ? Le but de la transition juste n’était-il pas « [d’] offrir des possibilités de formation, d’éducation et d’emploi dans les secteurs émergents à faible émission de carbone comme l’efficacité énergétique, la technologie, les soins de santé et les énergies renouvelables » comme l’écrit pourtant Greenpeace Canada dans son communiqué sus-nommé ? D’ailleurs, Rachel Notley, cheffe de l’opposition albertaine reprochait ceci au gouvernement actuel: «Mme Notley a aussi affirmé que M. Kenney avait eu tort lorsque son gouvernement a démantelé, l'automne dernier, des mesures incitatives fiscales conçues pour attirer des entreprises plus diversifiées, y compris des entreprises de haute technologie, en Alberta.» (7)

À la place, le fédéral maintient ces travailleurs-travailleuses (dont le salaire n’était déjà pas à plaindre, rappelons-le) dépendants et dépendantes du même secteur voué à péricliter.

Demeurons vigilantes et vigilants lorsque le gouvernement colorie en vert ses subventions aux pétrolières, car, comme on le constate avec les groupes environnementaux, même ceux-ci peuvent se faire flouer.

Kevin Guillaume Bazire

Noémi Bureau-Civil

Patricia Posadas

Martin Poirier

Benoit St-Hilaire

Prospérité Sans Pétrole et NON à une marée noire dans le Saint-Laurent

(1) https://www.greenpeace.org/canada/fr/communique-de-presse/30604/reponse-de-greenpeace-canada-au-plan-de-financement-federal-pour-le-petrole-et-le-gaz

(2)

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1644802/economie-budget-petrole-chomage-plan-emploi

(3)

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1692230/alberta-puits-orphelins-ottawa-environnement-economie-petrole

(4)

https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/202004/17/01-5269753-hydrocarbures-laide-doit-etre-assortie-de-conditions-disent-des-ecologistes.php

(5)

http://www.orphanwell.ca

(6)

https://www.rcinet.ca/fr/2019/11/15/crise-petroliere-en-alberta-le-nettoyage-des-vieux-puits-devient-problematique

(7) https://www.ledroit.com/actualites/le-fil-groupe-capitales-medias/plongeon-du-petrole-kenney-fera-tout-ce-quil-faut-pour-sauver-lalberta-ab860f2e2d89d67cc0f9196ef5b1cb11


Les dernières nouvelles
Archives
bottom of page